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La Chinafrique (S. Michel, M. Beuret)

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Dimanche, décembre 12, 2010, 17:37
L'article publié dans Algérie, Maroc. Lire toutes les articles de cette catégorie : AlgérieRSS 2.0 Maroc.

« Nous souhaiterions que la Chine dirige le monde, et quand ce sera le cas, nous voulons être juste derrière vous. Quand vous allez sur la Lune, nous ne voulons pas être laissés derrière, nous voulons être avec vous. » Olusegun Obasanjo, président du Nigéria, s’adressant à Hu Jintao, 2006

Pendant des millénaires, l’Empire du Milieu ne s’est pas intéressé au reste du monde. Pour quoi faire ? La Chine était le pays le plus avancé, le plus fertile, le plus peuplé, le plus civilisé. Par hypothèse, dans l’idéologie impériale et, souvent, dans la réalité aussi.

Pourquoi les Fils du Ciel se seraient-ils préoccupés de ce qui se faisait chez les barbares ? En 1421, une flotte chinoise gigantesque atteint les rivages du Kenya. Les Chinois observent : pas intéressant, mieux vaut rentrer au pays. Confucius l’avait dit, et à raison : l’important, c’est la stabilité.

Seulement voilà : désormais, vraiment, tout change, même la Chine.

La Chine, désormais, à l’assaut de l’Afrique.

Note de lecture sur « La Chinafrique », un ouvrage qui fait le point sur la question. L’œuvre fourmille d’informations intéressantes. Nous zapperons les passages politiquement corrects du type « c’est pas bien de soutenir le Soudan à cause des massacres au Darfour », et autres culculteries politiquement correctes inévitables dans un livre écrit par des journalistes français. Mais nous n’omettrons aucun type d’information vraiment intéressant – fût-ce l’enseignement d’une série d’anecdotes révélatrices.

Brazzavile, Congo. Les auteurs marchent à travers la ville. Des enfants les apostrophent, à l’Africaine, c’est-à-dire sans chercher à connaître leur nom, mais sur un ton chaleureux.

Que disent-ils ? « Hello mista ? » Non. « Monsieur Monsieur ! » Non plus.

Ils disent : « Ni hao ».

Pour eux, tous les étrangers sont chinois.

Brazzaville, une ville où les compagnies chinoises construisent… le Ministère de la Francophonie.

C’est par cette anecdote que s’ouvre l’ouvrage. Une anecdote qui résume au fond tout le contenu du livre : amis occidentaux, nous avons le regret de vous faire savoir que la Chine est en train de vous remplacer en Afrique.

L’agroalimentaire au Nigéria, ça n’existait pas. Maintenant, si : les Chinois sont là. Les autoroutes au Soudan, ça n’existait pas. Maintenant si : les Chinois les construisent, et en échange, ils achètent le pétrole – pour qu’avec l’argent du pétrole, le gouvernement leur achète les autoroutes.

Tout. Ils prennent tout. Ils se jettent sur les marchés, comme des morts de faim sur une miche de pain.

La raison ? Très simple pour certains. Si l’on en croit par exemple Lansana Conté, le Président guinéen : les Chinois ne colonisent pas, ils travaillent. La Chine n’a pas besoin de dominer les Etats africains pour rafler les matières premières : elle troque capital et travail contre ressources. C’est un nouveau modèle d’implantation étrangère en Afrique, et le succès de ce modèle n’a rien de mystérieux : les Chinois s’imposeraient spontanément, par l’incroyable potentiel de développement qu’ils dégagent, avec leur main d’œuvre docile, bien encadrée par des ingénieurs compétents, financée par des réserves de capital apparemment inépuisables. Une conquête par le travail, sans guerre, sans armes ?

Une conquête commerciale, en tout cas. Le commerce bilatéral Chine/Afrique est passé de 10 à 55 milliards de dollars entre 2000 et 2006, et devrait atteindre 100 milliards en 2010. C’est peu à l’échelle de l’économie chinoise, moins de 10 % des exportations. Mais c’est énorme dans certains pays africains, au PIB microscopique. La Chine vient tout simplement de remplacer la France comme deuxième partenaire commercial de l’Afrique.

Une conquête, aussi, sur le plan de la présence humaine. De 500.000 à 750.000 Chinois vivent en Afrique (contre 110.000 Français). Il est loin le temps où Pékin tentait de dissuader ses ressortissants de quitter le pays. Le slogan de Hu Jintao : « Sortez ! »

Bien sûr, au-delà de cette image de propagande afro-chinoise, la réalité est plus complexe…

Il y a tout d’abord les motivations des autorités chinoises, qui n’ont (évidemment) rien à voir avec un quelconque blabla multiculturel sur l’enrichissement par les différences et autres niaiseries bien-pensantes occidentales (en Afrique, les Chinois ne se mélangent pratiquement pas avec les autochtones).

Les Chinois vont en Afrique parce qu’on y trouve ce qu’ils recherchent aujourd’hui le plus : des matières premières. La Chine est un pays qui possède probablement 2.000 milliards de dollars de réserves de change, et qui cherche par tous les moyens à s’en débarrasser. Alors si les Africains veulent des dollars en échange de leurs matières premières, pourquoi se priver ?

Les Chinois vont aussi en Afrique parce qu’ils ont besoin de débouchés. Les Africains ont des chantiers gigantesques en perspective ? Parfait, la Chine a, quant à elle, désespérément besoin de résorber son chômage, alors allons-y : sueur jaune contre pétrole noir, tel est le nom du film. C’est aussi simple que cela.

Le paradoxe est que les Chinois sont en train de développer les infrastructures africaines (comme jadis les colonisateurs), sans que les Africains, pour autant, s’approprient à ce stade massivement les technologies, les savoirs-faires, les méthodes (comme jadis, leurs ancêtres colonisés). La Chine est donc en train, aussi étonnant que cela paraisse, de réussir la première colonisation par l’économie physique de production.

Un exemple ? La démarche chinoise est présentée comme un partenariat gagnant-gagnant, entre partenaires égaux. Mais alors, pourquoi l’acceptation des « cadeaux » chinois par les pays africains qui s’ouvrent à Pékin entraîne-t-elle, obligatoirement, la rupture des relations commerciales de ces pays avec Taiwan ? Pourquoi tout le continent africain, à l’exception de cinq petits pays, s’est-il fermé à Taiwan au fur et à mesure qu’il s’ouvrait à Pékin ?

Entrons dans le détail de l’analyse. Quelle est la « méthode chinoise » en Afrique ? Qu’implique-t-elle pour l’Occident ?

Les Chinois abordent les pays africains un par un, sans a priori idéologique. Ils ne chapitrent personne sur les droits de l’homme. Ils débarquent et proposent, d’entrée de jeu ou presque, un « package » intégré : « Ici, nous allons vous construire un barrage, là, nous allons vous construire des routes, et en échange, là-bas, la mine, nous l’exploitons. » C’est évidemment plus productif que la méthode occidentale (ressources naturelles contre pots de vin, pression politique voire militaire, etc.). Mais cela revient en réalité à une nouvelle forme de conquête (conquête habile, puisqu’elle reçoit l’assentiment de ceux qui vont être conquis).

Le grand point fort des Chinois, à ce petit jeu : ils tiennent parole, et ça se sait (surtout dans des pays où, quand un chantier est terminé dans les temps, ça étonne tout le monde).

Ils tiennent parole, et, en outre, ils s’engagent fréquemment sur des prix imbattables. La Banque Mondiale a fait pression sur les pays africains pour qu’ils ouvrent leurs marchés publics aux appels d’offre. Une manière comme une autre, sans doute, de garantir l’emprise des multinationales occidentales… sauf que ce sont les Chinois qui gagnent à tous les coups ! Et pour cause : main d’œuvre bon marché, cadres dormant dans les baraquements avec les ouvriers… les standards chinois ne sont pas précisément les mêmes que ceux des occidentaux.

Premier résultat : enfin une bonne nouvelle, la Chine va enterrer la Françafrique !

A ce propos, il n’est peut-être pas anodin de remarquer que quelques mois avant le déclenchement de la guerre en Côte-d’Ivoire, une délégation d’hommes d’affaires chinois avait rendu visite à Laurent Gbagbo. Quand on remarque, en outre, qu’après cette guerre filmée en direct par TF1, filiale de Bouygues, ledit Gbagbo a confié des contrats de construction importants aux firmes chinoises, et dans la foulée offert des terrains de prospection pétrolière à Pékin…

Autre exemple : l’uranium du Niger. 2007 : une compagnie chinoise a obtenu une concession sur les possibles gisements pétroliers du Kawar, une région frontalière de la Lybie. Très vite, un mystérieux mouvement « zapatiste » touareg attaque les installations chinoises. On soupçonne Khadafi, le nouvel ami de l’Occident, d’avoir financé l’insurrection. On se dit surtout que c’est un test : les choses sérieuses, c’est l’uranium (vital pour le nucléaire français). En 2006, trois compagnies chinoises ont signé avec le gouvernement nigérien pour l’uranium du Sahara : rien ne va plus. Et voici justement que, dans la foulée de leur combat pétrolo-khadhafo-zapatiste du Kawar, les Touaregs (enfin, les Touaregs…) enlèvent justement le directeur général d’une de ces sociétés chinoises. Le président du Niger, dans la foulée, accuse Areva de soutenir les rebelles (même pas vrai). Le tout se passe à peu près au moment de la surréaliste visite de Khadafi en France, soit dit en passant (un pur hasard, sans doute)… Et quand l’ancien numéro deux de la cellule africaine de l’Elysée est expulsé du pays quelques jours plus tard, l’affaire est officielle : au Niger, la France doit désormais compter avec l’influence chinoise.

Tout ceci n’a bien entendu rien à voir avec les attaques d’Al-Kaïda au Niger, ni avec une quelconque volonté des USA de s’imposer en profitant d’une confrontation franco-chinoise, tout comme on aurait tort de faire un lien entre ces évènements et la courageuse position de Human Rights Watch, l’ONG du philanthrope George Soros, à propos de la répression gouvernementale au Kawar…

Enfin, il y a quand même une morale : grâce à la pression chinoise, le Niger a pu renégocier en position de force avec Areva, et obtient désormais un meilleur prix pour son minerai. Les patriotes français ne pourront cependant pas ici saluer fraternellement une victoire du peuple nigérien, car la morale de l’histoire est, hélas, toute relative : il est fort probable que l’entourage présidentiel de ce pays africain typique va prochainement investir en Suisse et au Luxembourg.

Bref, la Françafrique vit probablement ces dernières années. Mais cela ne fera pas forcément le bonheur des Africains.

En attendant l’expulsion complète des Français, la conquête chinoise de l’Afrique continue, par le bas, chantier par chantier, mine par mine. La démarche vaut d’ailleurs aussi bien pour les grands investissements, planifiés par Pékin méthodiquement dans le cadre d’un système d’entreprises que les bureaux d’Etat continuent à coordonner (et à financer), que pour les petits investissements, conduits par des entrepreneurs individuels financés tout simplement par leur famille, restée en Chine. Avec l’argent économisé sou par sou dans telle banlieue de Shanghai, un commerçant chinois dynamique peut, sans problème, s’imposer à peu près partout en Afrique, comme restaurateur, couturier, etc. L’Afrique découvre, après l’Insulinde, la capacité étonnante des Chinois à travailler sans cesse, épargner sans relâche, et prospérer sans bruit.

Autre point fort, moins important mais réel : la Chine ne juge pas ceux avec qui elle fait affaire. A Pékin, Mugabe est le bienvenu. Hu Jintao n’a rien à dire sur les droits de l’homme en Afrique (et pour cause…). Le Soudan est aussi bien traité en Chine qu’il est rejeté par les occidentaux (et Israël) pour des raisons qui ont plus à voir avec le soutien permanent d’Al-Bashir aux Palestiniens qu’avec le soi-disant « génocide » du Darfour. A ce propos, il faut s’y faire : une des raisons de la percée chinoise en Afrique est que les Chinois n’ont pas à s’encombrer d’un allié israélien qui, aux yeux du monde musulman, est pestiféré.

Et la Chine ne se pose pas davantage de question sur la moralité financière des élites africaines : elle fait des affaires, point final. Si cela implique de travailler avec un dictateur qui esclavagise une partie de sa population, où est le problème ? Du point de vue de Pékin, d’ailleurs, esclavagiser sa population est-il seulement condamnable ? On peut supposer que ce qui choque les Chinois, ce n’est pas l’inégalité en Afrique, mais plutôt l’inefficacité.

Enfin, last but not least, Pékin sait habilement jouer sur le souvenir du mouvement des non-alignés. La Chine offre aux Africains une sorte d’alternative à la domination occidentale. Elle leur promet de respecter leur intégrité territoriale, de ne pas s’ingérer dans leurs affaires, de les traiter avec égalité en vue de bénéfices mutuels – la conférence de Bandung, revue et corrigée façon capitalisme asiatique. Les Africains, bien placés pour savoir ce que recouvrent concrètement les arnaques « humanitaires » des spécialistes de l’ingérence occidentale, apprécient.

En arrière-plan, un rêve : le 1789 mondial qui verrait le Sud, majoritaire à l’ONU, prendre le pouvoir, tel un tiers-état mondial en révolte contre le Nord prédateur. Moment emblématique de ce rêve chinois des Africains : le lancement par Pékin d’un satellite nigérian, en 2006. Mais en arrière-plan de cet arrière-plan, bien sûr, il y a, aussi et surtout, une grande stratégie chinoise : promettre la révolution au Sud, et ainsi, remplacer les USA comme puissance mondiale dominante sur la scène diplomatique.

L’entreprise chinoise présente, tout de même, quelques points faibles.

Tout d’abord, la Chine entre en Afrique, mais ne se mélange pas à elle. Si les Chinois en Afrique ne cherchent pas à se faire des amis africains, les étudiants africains en Chine (nombreux désormais) constatent qu’il leur est presque impossible de se faire des amis chinois. Donc, à ce stade, il ne semble pas que la Chine transforme profondément les mentalités africaines. Les chefs d’Etat africains continuent à penser le gouvernement comme l’art de la parole grandiloquente et creuse, les populations ne semblent pas saisies par la fièvre activiste qui prépare le développement (pour produire plus, il faut d’abord vouloir produire plus). Ici, il faut bien dire que le racisme des Chinois envers les Noirs (discret, mais aux dires des auteurs, très marqué) va rendre difficile l’imprégnation des sociétés africaines par leur nouvelle puissance tutélaire. C’est d’ailleurs probablement la seule carte qu’il reste à l’Amérique en Afrique : la victoire culturelle. Les Américains, semble-t-il, en sont conscients.

Ensuite, la Chine va se heurter, en Afrique, aux mêmes problèmes que les autres puissances néocoloniales. Au Nigéria, ses ressortissants sont pris en otages, exactement comme les occidentaux. Un peu partout sur ce continent décidément aussi empressé de se faire coloniser que d’expulser ses colonisateurs, la sinophobie monte (les Africains reprochant en gros aux Chinois de prendre leur travail – nous ne commenterons pas). Il est probable, sur ce point, que Pékin va devoir réguler davantage les initiatives individuelles, car ce sont surtout elles qui provoquent des tensions. Les petits commerçants chinois dévorent littéralement le marché dans certaines agglomérations africaines, la pacotille chinoise détrône l’africaine (mieux faite, moins chère) ; ce ne sont pas les grands enjeux économiques qui génèrent des incompréhensions entre Africains et Chinois, mais les petites choses du quotidien.

D’une manière générale, les Africains « d’en bas », ceux qui assument la réalité de la situation, ont une vision de la percée chinoise sensiblement moins idyllique que celle de leurs élites en adoration devant Pékin. Les ouvriers africains employés sur les chantiers chinois, dans les usines chinoises, n’en reviennent pas, paraît-il, de l’ardeur au travail de leurs collègues asiatiques… mais ils sont tout aussi surpris par la brutalité de l’encadrement, inouïe dit-on (châtiment corporel pour l’ouvrier trop lent ou maladroit, comme au XIX° siècle), et d’une manière générale par la rudesse, la violence permanente, des rapports humains « à la Chinoise ». Où l’on se souvient que le dressage de la main d’œuvre du capitalisme chinois fut l’affaire des Gardes Rouges. En Algérie, les bases de travailleurs chinois, enclos de baraquements peints de couleurs chatoyantes, sont gardées militairement, avec, devant les barbelés, des haut-parleurs diffusant de la musique martiale pour encourager les ouvriers. Les Algériens vont apprendre qu’il y a des peuples plus rudes que les Français. Pas sûr qu’ils apprécient.

*
Cela dit, soyons clair : au final, quand on balance points forts et faibles, on ne s’étonne pas de l’ampleur de la percée chinoise en Afrique…

De cette stratégie simple et progressive, la Chine commence d’ailleurs à retirer de grands avantages.

Des matières premières, d’abord, bien sûr. La Chine obtient d’ores et déjà, du continent noir, 30 % de son pétrole. Les compagnies chinoises exploitent les forêts africaines (enfin, celles qui restent à défricher après notre passage). Robert Mugabe va s’étrangler : les terres africaines (Zambie, en particulier) sont désormais mises en valeur, de plus en plus, par des fermiers chinois (qui auront donc remplacé les Anglais !). Etc.

La Chine peut aussi, via l’Afrique, contourner d’éventuelles barrières douanières en produisant (tout ou partie) dans des pays ayant eux-mêmes conclu des accords de libre-échange avec d’autres zones commerciales. C’est pourquoi le Maroc, par exemple, a pu conclure de très fructueux accords avec Pékin : il a signé des accords de libre-échange avec l’Union Européenne et les USA, entre autres. Pour la Chine, le Maroc est un cheval de Troie.

L’Afrique, pour Pékin, c’est peut-être, aussi, pour l’instant de manière très marginale, un terrain d’exercice. Un lieu où l’influence chinoise peut commencer à s’exercer de manière dure, directe – parce que beaucoup de pays africains sont faibles, divisés contre eux-mêmes. C’est en somme un site d’entraînement pour une superpuissance qui doit encore se préparer à un prochain statut de parité avec les USA.

La Chine, tout doucement, commence à se mettre, aussi, au colonialisme « dur », celui des armes (partenariats militaires avec 43 pays africains). Pékin paye les salaires des fonctionnaires centrafricains en échange de l’organisation, sur le sol du Centre-Afrique, d’une rébellion tchadienne équipée d’armes chinoises (enjeu : le pétrole du Tchad). L’opération échoue sur le terrain, mais le président tchadien, sentant le vent tourner, comprenant que la France recule et que la Chine avance, choisit ensuite de donner son pétrole à Pékin. Ainsi, les services secrets chinois apprennent, se perfectionnent… un jour, ça servira peut-être, sur des théâtres d’opération moins secondaires.

L’Afrique, c’est aussi, pour Pékin, un déversoir offert aux millions de travailleurs pauvres de la Chine intérieure. L’Empire du Milieu possède un réservoir de main d’œuvre gigantesque, et son principal problème, c’est de trouver des débouchés viables. En Afrique, les Chinois peuvent travailler utilement, les investissements sont rentabilisés vite.

Les grandes entreprises chinoises organisent ici une émigration de main d’œuvre méthodique. Tout le monde s’y retrouve : les travailleurs chinois, qui gagnent plus (quelques années de bagne en Afrique, dans des baraquements, avec des journées de travail épuisantes : 20.000 dollars à la sortie, pour le retour au pays) ; les grandes entreprises chinoises, qui font des bénéfices ; et les Africains, qui voient brutalement s’envoler leur produit intérieur brut… sans avoir eu besoin d’organiser sérieusement leurs propres entreprises.

Merveille de la mondialisation : Jacques Attali va nous expliquer que l’Afrique se développe, alors qu’en réalité, les chômeurs africains rêvent d’Europe pendant que leurs pays sont mis en exploitation par les firmes chinoises ! Pendant ce temps-là, les « élites » africaines ne se demandent même pas pourquoi elles ont eu besoin des Chinois pour construire les beaux quartiers où elles se pavanent, en rêvant de la Lune.

Et en Occident, on fait quoi, alors que la Chine s’affirme en Afrique ?

Eh bien, cette semaine comme chaque semaine, Ben « Helicopter » Bernanke imprime des dollars (il vient de s’acheter une nouvelle imprimante, plus performante), Cameron supprime le chômage en faisant travailler gratuitement et inutilement les chômeurs (il fallait y penser), « Angie » Merkel désapprouve le protectionnisme (comme si c’était la question pour tout le monde…), Sarko se poudre le nez (remarquez, au point où nous en sommes…), l’industrie crève et on renfloue les banques.

Conclusion : il faudrait se réveiller.

Karl Marx a dit quelque part, en substance, qu’un monde s’écroule quand le cadre qu’il avait tracé est saturé par les forces productives qu’il pouvait générer.

Les forces productives de l’Occident ont saturé le cadre occidental, et l’Occident commence à s’écrouler.

Mais il semble qu’il reste encore pas mal de place aux forces productives en Chine. Une place par exemple juste aussi étendue que le monde entier – l’Occident en moins.

C’est, semble-t-il, aussi simple que ça.

(scriptoblog.com)

Algérie Focus

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